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Parmi mes pires souvenirs de mon adolescence, le lycée est responsable de la majorité d'entre eux. La récente polémique à deux balles pour tenter encore et encore de décider comment devraient s'habiller les adolescentes n'est selon moi qu'un révélateur de plus de l'horreur réactionnaire qu'est le lycée, prolongement inévitable et le plus abouti du système éducatif d'état, institution réactionnaire et autoritaire par excellence, et plus généralement un "rite de passage" pour formater les ados dans le moule du système capitaliste. Un endoctrinement visant à faire de nous des travailleurs et travailleuses bien dociles et productifs et productives (on dit maintenant "flexibles").

 

Il ne sera pas question d’alimenter la polémique, mais de profiter que cette horreur est "sous le feu des projecteurs" pour parler du lycée en général. On met les vêtements que l'on veut. Point. Seulement, je remarque que les réactions à cette polémique ratent à chaque fois (pour le peu que j'en ai vu) l'occasion de proposer une critique radicale de l'institution-même, et plus généralement de son instigateur étatique, qui propose d'endoctriner les mineures de manière plus violente que d'habitude, mais qui ne se prive pas de le faire de manière plus insidieuse habituellement.

 

Je profite que cette période ne m'est pas encore trop lointaine pour me permettre une critique à jour et concernée (au sens où je connais encore de l'intérieur le fonctionnement de cette institution).

 

Maintenant, voici 10 bonnes raisons de détester le lycée. J'ai eu du mal à choisir, il y en a trop, et vous avez sans aucun doute les vôtres propres, n'hésitez pas à les partager en commentaire. 😉

 

Raison première : C'est chiant

 

Qui s'amuse au lycée sérieux ? On a autre chose à faire de sa vie quand on a entre 16 et 18 ans. On veut profiter de notre jeunesse éphémère. Mais non, l'état nous impose de rester pour obtenir ce fichu papier qui nous permettra de continuer à s'ennuyer à la fac. Et même les profs ça les saoule d'être là. Faut dire qu'ils et elles ont 10 bonnes raisons de détester le travail (voir plus bas mon blog sur le sujet). J'ai plein d'anecdotes sur à quel point c'était ennuyeux. Notamment toutes les choses qu'on faisait pour passer le temps en cours : essayer de suivre le cours (ça ne marche pas, la plupart du temps c'est des conneries d'une abstraction frisant le ridicule et joignant l'ennuyeux à l'inutile), compter le nombre de fois que le/la prof produit son tic de langage (dans mon cas, j'avais un prof d'histoire-géo qu'avait réussi à prononcer "effectivement" plus de 100 fois en 1 heure ! c'est dire la nervosité du monsieur...), bataille navale avec son voisin, dessiner etc. Mais le mieux était quand même de s'entrainer à apprendre des choses qui nous intéressent vraiment : en cours d'histoire-géo (encore) on apprenait pendant le cours les noms de pays, leurs emplacements, leurs capitales, leurs langues officielles etc. Pas franchement utile mais ça devenait un jeu plaisant à la longue, et ça permettaient de ne plus entendre les "effectivement" qui me hantaient.

 

A 16 ans, on veut jouer, rire, danser, découvrir du/le monde, vivre, en quelque sorte, et pas être enfermé·es dans un bloc de béton avec des gens qui ne nous aiment pas (et c'est réciproque), pour indigérer par cœur des conneries qu'on oubliera dès le diplôme officiellement obtenu, après les avoir au préalable régurgitées sur des papiers qui seront corrigés avec au moins autant d'ennui qu'il a fallu pour les remplir.

 

Ça ennuie tout le monde le lycée. Les graffitis lycéens parlent d'eux-même, et bien mieux que moi : Un tag sur une table disait effectivement : "Mets une croix si tu t'ennuies". Inutile de préciser le succès de la démarche, certaines personnes mettaient même plusieurs croix en le précisaient sur le côté.

Raison deux : C'est inutile

 

En vrai, mis à part l'affreux bac qui sert de passe-droit à l'accès à la fac, qu'est-ce que vous faites ou avez fait ou appris de bien utile au lycée ? Vous souvenez-vous seulement de la moitié de ce que vous ont enseigné vos profs ?

 

Je ne connais pas trop le cas des littéraires mais je peux vous dire qu'en "science" (il n'y a aucune méthode scientifique de proposé, on doit apprendre des âneries par cœur et les recracher, sans recul critique) la difficulté et l'abstraction sont d'une immensité ridicule. La plupart des gens que j'ai continué à voir après le lycée et qui sont actuellement "chimistes" "ingénieur·es" ou même "inspecteurs/inspectrices qualité" n'ont jamais à utiliser dans leur travail plus du dixième de ce qui est enseigné au lycée. Le travail est une routine qu'on acquiert "sur le terrain". Si des apprentissages théoriques peuvent être bien sûr nécessaires, le but d'une telle difficulté m'échappe. A part si on voit que la fonction (et non le "but" complotiste d'un groupe mystérieux) de l'institution scolaire dans la société capitaliste est de préparer les nouvelles générations à se conformer à des normes. Ce qui nous amène à un point plus dramatique.

 

Raison trois : C'est aliénant

 

L'aliénation, Marx en a parlé dans ses Manuscrit de 1844, il s'agit de l'état dans lequel se trouve un·e individu·e, une classe sociale, lorsqu'il ou elle n'est plus tout à fait elle-même (ça vient du latin alieantio : "se vendre", ou "être extérieur·e à soi-même". Dans l'exemple que Marx prend, les ouvriers et ouvrières, en vendant leur force de travail, finissent par n'être que des pièces dans la machine capitaliste.

 

Si au lycée, vous ne vendez pas une force de travail, vous participez aux efforts capitalistes indirectement en venant tous les jours et acceptant cet état de fait; lorsque vous allez au lycée, vous vous préparez (même sans le vouloir) à vous retrouver sur le marché du travail, à vendre votre force de travail. En un sens donc, vous êtes aliéné·es car vous vous retrouvez embarqué·es dans le système de production capitaliste que vous le vouliez ou non.

 

De plus, vous n'avez pas la possibilité de vous épanouir librement, ce qui vous aliène, dans un autre sens, celui de la perte de votre temps de vie.

 

Raison quatre : c'est trèèès long

 

Trois ans, au mieux, si on a la chance de ne pas redoubler, durant notre âge le plus important dans la constitution de notre maturité, enfermé·es du matin au soir pour faire tout un tas de chose que l'on ne veut pas faire, sans que l'on nous consulte jamais. Il n'y a que moi que ça choque ? Ne vous êtes-vous jamais demandé·es ce que vous feriez si vous n'aviez pas tout ce temps de perdu ?

 

Je me souviens avoir vu sur une table, parmi les nombreux graffitis, un plutôt original qui proposait de noter un bâton à chaque fois que le tramway passait devant la fenêtre. N'est-ce pas là une perte de temps ? Est-ce vraiment cela que l'on veut faire de notre jeunesse ?

 

Trois ans, c'est long, c'est trop. Mais une année resterait de trop. Une journée même serait toujours un calvaire abominable. Comme la fameuse (fumeuse) "journée d'appel", qui fut sans hésiter le moment le plus ennuyeux de toute ma vie. Parce que justement, la "JAPD" ou "JDC" n'est qu'une version réduite et appauvrie du lycée (ça reste un endoctrinement forcé, les activités instructives en moins) que l'on ne supporte pas aussi facilement que le lycée seulement parce qu'on n'y est pas aussi habitué·e.

 

Là encore, le discours lycéen est bien plus évocateur que mes grandes envolées lyriques : Au lycée (comme au travail d'ailleurs, voir le blog sur ce sujet) on parle de son temps de lycée comme on parlerait d'une incarcération : "j'ai encore un an à tirer", "j'ai eu un sursis, je redoublement pas", "mise à l'épreuve du jury"... sont des exemples plus que courants de ce que l'on peut entendre dans les conversations lycéennes. Si les discours d'adolescent·es se trouvent contaminés par le lexique carcéral, c'est qu'il y a un truc qui va pas. Raison de plus.

 

Raison cinq : on est là de force

 

Ne faites pas les niais·es à prétendre que l'on peut effectivement et légalement ne pas aller au lycée : la pression économique et sociale est bien trop forte pour être surmontée. Le capitalisme nous fait bien comprendre que : "pas de lycée = pas de bac, pas de bac = pas de fac, pas de fac = pas de travail, pas de travail = pas de salaire". Alors que, pour avoir fait (à grand regret) plus de 5 ans de fac, je peux vous assurer que c'est comme le lycée : c'est chiant, inutile et n'offre aucune perspective d'obtenir un revenu.

 

Bien que quelques personnes réussissent à s'en passer et éduquer leurs enfants en dehors du système éducatif d'état (voir article en lien plus bas), dans tous les cas, ce genre de démarche reste inféodé à la menace du bac final et du programme imposé. Tout au plus pouvons-nous espérer que ces personnes sont plus heureuses du fait qu'elles ne sont pas au lycée.

 

Les sanctions ne se font pas attendre lorsque l'on n'est pas à l'heure, ou juste pas là du tout. Même après avoir obtenu la majorité, je me souviens avoir continué à avoir peur de la sanction et avoir intériorisé le besoin d'être en présentiel à chaque cours. Pire, même avoir continué à faire signer des mots à mes parents alors que j'aurais pu (et dû) cramer mon carnet de flicage et de sanction (le vrai nom du "carnet de liaison" ou "de correspondance") sans problème. Le tout, alors que je n'attendais que ces 18 ans pour pouvoir envoyer tout balader. Mais au bout de 3 ans dans une institution endoctrinante et aliénante, on a perdu toute forme de résistance et on a bien intégré (à tort) que l'on ne pouvait pas se passer du lycée et de ce que l'on détestait.

 

L'état et le capitalisme agissent de manière complémentaire dans un fonctionnement totalisant (pour ne pas dire totalitaire). Si l'on ne respecte pas une institution étatique, on ne peut pas s'intégrer au capitalisme, qui s'est rendu indispensable (ou qui a en tout cas parfaitement entretenue l'illusion spectaculaire de cette "indispension") aux individu·es au fil de son avancée historique.

 

Vos familles et proches plus vieilles et vieux ont totalement intégré et accepté cet état de fait. Ou alors, reniant leurs convictions passées avec une grande résignation malsaine, ont considéré ne pas avoir d'autre choix.

Raison 6 : Ça ne donne pas de quoi vivre

 

En vrai, votre lycée ne vous donne aucun boulot. Hormis peut-être pour les filières professionnelles que je ne connais pas assez. Vous ne sortirez jamais du lycée avec un bac sans mention et un job dans les mois qui suivent les vacances d'été suivantes. C'est un mythe entretenu par une gôche productiviste et nationaliste qui continue d'idéaliser à des fins électorales la période dite des "trentes glorieuses". Or, les trentes glorieuses, c'est aussi beaucoup de productivisme dû à la reconstruction d'après-guerre, et productivisme = travail de ouf (la sueur et le stress, l'épuisement à l'usine et dans les chantiers etc). Alors que, comme on l'a montré dans un autre blog sur le travail, c'est une activité détestable qui est aussi forcée et endoctrinante et aliénante que le lycée. Ce dernier prémâche le travail d'endoctrinement pour ne plus qu'on pose problème par la suite, qu'on ose plus envoyer chier nos supérieur·es, qu'on n'imagine même pas répondre à leurs provocations, humiliations, harcèlement... parce que cpe comme chef d'équipe ont un pouvoir des plus malsains sur nous.

 

Non mais soyons un minimum sérieux et sérieuses : qui a réellement "envie" de travailler ? Si c'est forcé, c'est bien qu'il y a un truc qui ne va pas. Écoutez un peu vos parents, vos proches, dans le monde du travail et appréciez leur "amour" du travail : "ho non je suis du matin demain", "ya madame X qui va encore me faire chier", "les clients sont insupportables", "vivement la retraite" etc. Demandez-leurs si elles ou ils continueraient de travailler avec la possibilité de partir à la retraite, pour voir.

 

Faudra m'expliquer un peu pourquoi on parle mal des gens qui n'aiment pas bosser alors que personne n'aime bosser, et à raison. En fait c'est très simple, on a intériorisé cet état de fait : "il FAUT bosser", "il n'y a PAS D'ALTERNATIVE". Le lycée est l'outil indispensable à cet endoctrinement étatique. Il faut s'occuper tôt de l'esprit critique des gens avant qu'il devienne difficile de leur faire accepter tout ça. Et pourtant, malgré ce fonctionnement systémique (pas manigancé par qui que ce soit, aucun complotisme là-dedans, c'est juste comme ça que la société s'est constituée historiquement), il y a des personnes réfractaires, certes rares, mais suffisamment pour garder espoir. Et c'est cet optimisme qui me pousse à écrire ce blog pour m'adresser aux lycéen·nes d'ailleurs. Ces personnes qui n'ont aucune hésitation à bloquer leurs lycées et partir en manif' quand elles considèrent que ça vaut le coup.

 

Raison 7 : C'est humiliant et infantilisant

 

Lors de la puberté, on est à un moment de notre croissance qui mérite un temps de sommeil supérieur à la moyenne. Alors pourquoi est-ce qu'on nous fait nous lever, au mieux, à 7H tous les matins, pour ne revenir chez nous que vers 17H passsées ? A ces âges également, notre croissance, toujours elle, réclame une consommation de nourriture riche et variée, et surtout copieuse. Avez-vous déjà mangé dans une cantine de lycée ? (question rhétorique, personne n'a le temps de faire l'aller-retour chez soi-lycée en moins d'une heure) Dans mes souvenirs, parfois deux assiettes pleines ne me suffisaient pas. Quand au goût... On ne peut pas faire une bonne nourriture quand on doit en produire 1000 couverts par jour.

 

Le pouvoir des profs est immense, lorsque les parents sont du côté de ces derniers et dernières, ce pouvoir est décuplé. Les humiliations que j'ai subies - feuilles balancées à la figures, remarques sur nos capacités intellectuelles, ridiculisations publiques devant la classe, jusqu'aux insultes que je n'ai heureusement pas eu à subir mais "seulement" à témoigner, etc - ne sont que la manifestation la plus visible de leur arrogant mépris pour notre condition. S'il y a effectivement des "bon·nes" profs (j'ai dû en croiser 3 tout au plus, de la primaire au lycée), ça ne rattrape pas la honte que j'ai en pensant aux dizaines d'autres profs, et leurs sautes d'humeurs, que nous avons toutes et tous à supporter au quotidien...

 

Ne trouvez-vous pas étrange que l'on ne demande jamais leur avis aux lycéens et lycéennes sur l'organisation de leur vie et leur avenir alors qu'on nous sort de grands discours tous lisses sur la démocatie lors des séances de propagande nommées "éducation civique" ? Et ne me parlez pas de cette mascarade pitoyablement visible de "l'élection des délégué·es de classe". Tout le monde voit et sait qu'il ne s'agit que d'une mise en spectacle d'une démocratie fantasmée. Une préparation à la mascarade "adulte" (bien que tout aussi immature) de l'électoralisme.

 

Et bien, il s'agit là de l'infantilisation. L'infantilisation est une forme de mépris qui permet de tenir les personnes enfermées dans un contrôle mental et comportemental. Les personnes infantilisées ne peuvent plus que penser et agir en fonction de son/sa "infantilisant·e", qui se présente de manière nécessaire comme la personne pensant comme il faudrait. En somme, l'infantilisation est la projection sur autrui du regard passif, se transformant par contraste avec la réalité en mépris actif, qu'on a pour les enfants. Cette infantilisation se poursuivra toute votre vie. Lorsque vous serez "enfin" salarié·es (YAY ! Bienvenue dans le monde de l'exploitation \o/ ... Lol), on ne vous permettra pas de vous exprimer. Au mieux, des délégués syndicaux continueront la mise en spectacle de la démocratie et pourront obtenir quelques allègements de vos difficiles conditions pour vous faire fermer votre gueule et continuer de bosser. Vous ne serez jamais consulté·es, ou alors on fera mine d'en avoir quelque chose à faire, et lorsque vous aurez des critiques à faire, on vous dira que vous ne comprenez pas, que vous n'avez pas l'expérience, que c'est normal de penser comme ça à votre âge... et lorsque vous aurez "de la bouteille", on vous dira que vos idées sont dépassées, on sous-entendra que vous êtes séniles, on se moquera même de vous sans réfléchir à vos idées.

 

La notation est assez incroyablement symbolique de la violence institutionnelle d'état infligée aux jeunes gens. C'est sidérant que l'on trouve encore moyen de mettre des notes à des personnes, souvent accompagnées de leur lot de petits commentaires acides de la part des correcteurs et correctrices. Remarques effectuées tant sur la copie qu'à l'oral devant toute la classe. C'est l'outil d'humiliation le plus efficace et le plus bureaucratique qui soit. On angoisse à l'idée de se retrouver dans une société fictionnelle où chacun·e pourra noter ses semblables mais on y est déjà, de manière juste hiérarchisée. Les profs notent les élèves, les inspecteur/inspectrices notent les profs. Qu'est-ce qui justifie que l'on inflige ça à des enfants de la primaire, dès 5-6 ans, jusqu'aux jeunes adultes de la fac, jusqu'à 25-30 ans ? La nécessité bureaucratique de classer et mettre en concurrence.

 

Le lycée ne saurait exister sans notation des élèves. Il pourra toujours trouver une parade pour rendre anonymes les chiffres ou les enlever, mais il n'y aurait aucun lycée sans classement des élèves et mise en concurrence. Et ça passe forcément par ce symbole de la violence bureaucratique, d'état et capitaliste, la réduction des gens à leurs données chiffrées, leurs performances.

 

Et figurez-vous que même les profs sont noté·es ! Par des inspecteurs et inspectrices relou, qui leur donnent aussi des instructions infaisables et contradictoires. Enfin bref, la volonté de formatage bureaucratique de la vie (qui devient ainsi survie), c'est le chaos le plus complet.

 

C'est a se demander pourquoi les profs et les élèves n'ont toujours pas constituée une alliance pour lutter contre le lycée, l'état et le capitalisme... En fait je pense cette "alliance" impossible tant les intérêts des deux groupes divergent. Les profs, pour conserver leur revenu, donc leur travail, sont obligé·es de faire de leur mieux pour participer au formatage des élèves. Ils et elles sont maintenu·es enchaîné·es par le mécanisme salarial. Ce n'est que spéculation mais il me semblerait plus plausible qu'un mouvement lycéen soit tellement radical et constitué qu'il finirai par imposer aux professeur·es de se positionner et donc de révéler leurs contradictions (vouloir conserver le status quo pour continuer à consommer, ou vouloir le bonheur des jeunes gens). Ainsi, on aura des professeurs qui répèteront les formes de domination agistes (= en fonction de l'âge) dans les mouvements sociaux, qui diront au mouvement qu'il n'est pas suffisament "mature" pour savoir ce qu'il veut et quoi faire pour l'obtenir. Mais on aura aussi des profs plus explicitement dans le camp capitaliste et qui lutteront frontalement contre le mouvement. Enfin, les meilleurs mais qui resteront rares apporteront le soutient à la lutte autonome du mouvement, sans pour autant l'infantiliser et en émettant des critiques "d'égal·e à égal·e".

 

Raison 8 : ça inhibe la créativité et les relation sociales

 

En plus de faire perdre du temps pour profiter de la vie, avoir des horaires de merde (mon emploi du temps était souvent proche des 35 heures par semaine) et des devoirs et leçons de merde pleins la tête n'aide pas à créer. Créer au sens artistique, ou même de créer des relations saines. Quand on ne connaît les gens que parce qu'ils sont dans notre classe, on ne peut pas trop les voir autrement que comme, soit des compagnon·nes de galère, soit des connaissances lambda qu'on aura oubliées dès la fin de notre incarcération.

 

Combien de poèmes avez-vous écrit au lycée ? Combien en auriez-vous fait avec plus de temps ? De même avec des chansons, de la prose, de livre lus etc. Et en sortant du lycée. Avez-vous l'impression d'avoir développé votre créativité de quelque manière que ce soit ? Même si je hais tout autant la fac que le lycée, il faut admettre que j'y ai au moins eu plus de "temps de cerveau disponible" pour produire des musiques, de la poésie, des textes etc. Alors qu'au lycée, la fatigue, le bourrage de crâne avec des stupidités hyper-techniques et le manque de temps rendaient impossible toute imagination.

 

Savoir (ou pas) comment calculer je ne sais quelle connerie mathématique hors-sol n'amuse personne à part des "nerds" (cela ne concerne que quelques profs qui n'ont plus aucune autorité auprès de leurs élèves tant ils sont coupé·es des réalités) par définition paumé·es et dont l'imagination se limite à leur seule passion obsessionnelle. On passe parfois par ce genre de phase, mais ni le lycée ni le travail n'aide qui que ce soit à élargir ses horizons culturels et sociaux.

 

Raison 9 : Les devoirs et le bac

 

Sérieusement ?! Le lycée à la maison ?!  C'est-à-dire que lorsqu'on est enfin rentré·e à la maison ou l'appart, ou doit toujours penser à ces exercices à la con où on doit expliquer en quoi Rimbaud a développé l'idée du beau dans Anadiomède ou faire des calculs qui n'ont ni queue ni tête pour savoir si un astéroïde imaginaire va atteindre une planète imaginaire. Tout ça prend des heures. Souvent, on ne les fait pas, parce que flemme, et on a bien raison de nous donner ce répit. Mais le fait même que l'on envisage envahir une partie de notre temps, pourtant réservée à notre vie intime, par des fadaises abstraites est assez édifiant sur le manque de connexion à la réalité de cette institution, s'il fallait encore le montrer.

 

Toute cette violence me faisait pleurer, presque toutes les nuits, devant ces exercices incompréhensibles. "Je n'y arriverai jamais. Pourquoi on m'inflige ça ? Me demandais-je. A quoi ça sert de savoir faire ce truc ? Quel avenir ça me donnera ?" Quand j'avais encore la force morale de penser au-delà de mon bac...

 

Le bac est un moment stressant, la quintessence de la notation. Il est le lycée matérialisé : le point culminant du stress qui se manifeste toute l'année, l'humiliation de la comparaison des résultats, la frustration d'y arriver si "facilement" alors qu'on nous faisait faire des choses que même les astrophysicien·nes de carrière ne sauraient pas faire. C'est également un moyen de pression des plus puissants, on nous sous-entend à longueur de cours : "si vous n’obéissez pas, ou ne travaillez pas, vous n'aurez pas de bac". Celui-ci étant rendu indispensable par le fonctionnement-même de la société capitaliste et étatique.

Raison 10 : Ca donne accès à l'université

 

La fac est pire que le lycée, je vous assure. Essayez, par pitié, de vous en sortir sans. Vous n'y retrouverez que le continuation du lycée mais recouverte de faux-semblants arrogants pour duper les naïves et naïfs comme moi (je suis restée quand même 6 ans dans cette boue, pour me rendre compte de ce que je décrirai sans doute dans un autre blog). On n'y apprend pas l'esprit critique, on ne sait rien en y sortant et on n'a aucune facilité pour trouver un emploi planqué et tranquille pour subir le capitalisme et l'état de manière moins violente. Même si vous avez la patience monstrueuse, et le réseau suffisant, de faire un doctorat et la force surhumaine de ne pas en faire une dépression en cours de route, vous mangerez des pâtes à l'eau dans un appart' insalubre pendant 4 ans, au moins, puis vous ne trouverez de travail nulle part car pas de poste à la fac (sauf piston exceptionnel) et ailleurs vous serez alors "trop qualifié·es" (une autre manière de dire trop chère/cher).

 

Le lycée n'est qu'une étape essentiel dans la formation de machines obéissantes et productives. C'est une institution violente et autoritaire et l'actuelle polémique sur le port des vêtements n'est qu'une partie de la totalité de la violence institutionnelle d'état subie par tout le monde au quotidien. La patriarcat en question ici est exacerbé par un état qui a tout intérêt à contrôller et diviser les classes laborieuses pour mettre en sécurité le capitalisme.

 

Sans lycée, pas d'état, sans état pas de capitalisme.

 

Sans capitalisme, pas d'état, sans état pas de lycée.

 

Et là, le patriarcat ne serait encore qu'affaibli, on aura fait qu'une partie du travail. Toujours est-il que tant qu'il y aura des états et le capitalisme, il sera dérisoire de vouloir "réformer" la société pour lutter contre le patriarcat.

 

Cette polémique cache paradoxalement le problème institutionnel général que constitue le système éducatif d'état, serviteur bureaucratique du capitalisme. J'espère avoir, par ce modeste blog, apporté un élément de réponse à pourquoi juste critiquer l'oppression patriarcale du port des vêtements c'est se concentrer sur la partie visible d'un iceberg d'oppression monstrueux, partie d'un tout dont la critique se fait toujours attendre.

 

En vous souhaitant bon courage et espérons une libération par vous-mêmes pour vous-même.

 

En attendant, mettez les fringues qui vous plaisent, encore un trucs que les vieux cons pourront pas vous enlever, une des dernières libertés d'expressivité dans cette institution autoritaire et réactionnaire d'état.

 

Kate

 

Tag(s) : #anti-école, #anti-patriarcat
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