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Dans les critiques de l'école que je suis amenée à trouver, la complicité du "corps professoral" est rarement mise en question. Le statut des profs/adulte vis-à-vis des élèves/enfants/ados est quasi-jamais critiqué. Si la critique de l'école est mise en lien avec la domination adulte, l'âgisme, mais la domination professorale n'est pas souvent pensée. Cet article tente de pallier à ce manque.

 

Avant de commencer, je tiens d'abord à préciser qu'il ne s'agit nullement de mépriser le travail que font des personnes de bonne foi pour gagner leur croûte et/ou par vocation, souvent dans des conditions exécrables. Il ne faut pour autant oublier les profs qui n'ont aucun scrupule à pratiquer l'humiliation et la violence institutionnelle, au moins aussi nombreuses·eux.

Il va s'agir plutôt de penser une critique anarchiste du rôle des enseignant·es. Dans la pensée révolutionnaire, s'il est impossible de perdre de vue le concret, l'immédiat, les préoccupations contemporaine, il est contre-productif de perdre pour autant la visée proprement révolutionnaire, la question : on devrait faire quoi à la place ?

 

En effet, l'école, institution carcérale d'apprentissage des rôles de la société de classe, implique une hiérarchie, une discipline, stricte, qui se base sur le déséquilibre entre une autorité suprême, le prof, et des êtres considérés comme moins que rien (les élèves/enfants/ados). Cela est fondamentalement contraire à mes convictions libertaires (=anarchistes) et égalitaires.

 

Pour pouvoir évaluer le niveau de complicité des profs dans la violence institutionnelle du capitalisme-étatisme, il faut rappeler que les profs sont des fonctionnaires, ils ont "aux ordres" de l'état, qui les paye. On reviendra sur la "marge de manœuvre" dont les profs disposent, la possibilité de désobéir ou de "sortir des clous", plus ou moins légalement. De ce point de vue, les profs sont comme tous les fonctionnaires, dont les flics.

 

Un autre point de comparaison, plus spécifique cette fois, avec la police est la défense de l'état. Tous les fonctionnaires n'ont pas pour rôle immédiat de défendre l'état : le corps médical, les cheminot·es, les pompier·es etc, n'ont pas ce rôle, même si, comme on l'a vu dans ce même blog, il y a parfois un lien entre l'instauration d'une institution étatique et les intérêts de la bourgeoisie (voir: La sécu à 100% minimum !).

Les profs, comme les flics, doivent reproduire les violences institutionnelles : note, amende, punition, garde à vue, heure de colle etc. Sans état ils et elles n'existeraient pas, et vice versa : qui peut imaginer un état sans police ni prof ? Quand on y pense, le lien est alors évident. Le but de ce blog est aussi de chercher à rappeler ces évidences. Car évidemment la police comme l'école ont tout intérêt au contraire à faire intérioriser aux enfants/ados et citoyen·nes les violences de l'état. Le but principal de l'école étant la préparation à la vie de prolétaire.

La police étant un outil étatique de répression et de contrôle des comportements et opinions (voir article : 10 raisons de détester la police).

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Le cas des profs en formation est assez particulier : à la fois profs et élèves, ils et elles sont parmi les personnes les plus prêtent à respecter l'institution étatique et à reproduire la violence institutionnelle scolaire. En même temps, ces aspirant·es profs vivent souvent une grande précarité, il n'y a qu'à penser aux doctorant·es, futur·es universitaires, payé·e des clopinettes, souvent des mois après le travail produit. Cette précarité subie n'excuse en rien l'arrogance et la reproduction des violences institutionnelles des personnes qui trouveront une des rares places. A l'inverse, la reproduction des violences exacerbées par le capitalisme-étatisme est parfois inconsciente, il faut le garder en tête. Il s'agit de faire prendre conscience aux profs de leur rôle dans ces violences (mépris, âgisme, agressions verbales, notation etc) et une fois cette conscience présumée acquise, leur responsabilité devient plus claire.

 

L'évolution de la gestion étatique de l'éducation depuis des décennies a été assez dramatique pour le personnel enseignant et donc aussi pour les élèves  coupe budgétaire, réduction des effectifs etc. De langue à blanquette, la considération pour les profs n'est plus la même.

De manière plus sociale, morale même, les figures suprêmes d'autorité du capitalisme pré-libéral ont perdu de leur superbe : le curé, le flic, le maire, le prof. Qui respecte encore ces agents de l'état (et de l'église) ? Les profs se plaignent de perdre de plus en plus d'autorité à chaque rentrée scolaire. Certain·es parent·es - parfois de mauvaise fois il ne faut pas se le cacher - donne du fil à retordre, contredise l'autorité enseignante, à la moindre remarque. Cela aurait pu me réjouir si ça avait été dans une perspective émancipatrice des enfants/élèves/ados (=EEA), et d'une dissolution de la famille nucléaire patriarcale vers une société plus libertaire. Mais évidemment il n'en est rien. Il s'agit plutôt d'une lutte entre les autorités familiales et celles enseignantes. Le capitalisme-étatisme libéral, détestant les fonctionnaires et adorant l'individualisme, avantage forcément l'autorité familiale et donc la figure du père.

 

Dans tous les cas, cette lutte d'autorité n'est aucunement une lutte de classe. Il n'est aucunement question d'émancipation des EEA. Cela détourne la question. Les profs qui se contentent de cette problématique évitent soigneusement le vrai problème : que ce soit par la famille ou par l'école, les EEA sont soumis par l'âgisme. Leur parole n'est jamais prise en compte, comme si elles et ils ne pouvaient pas s'exprimer sur leurs ressentis. Et effectivement le système scolaire produit, et en a tout intérêt, des EEA incapables de réflexion politisée, d'autodéfense, d'auto-organisation etc. Bref, les EEA, avec le système scolaire, ne sera pas autonome. Les profs, au lieu d'en parler tous les jours, tenaillé·es par la culpabilité, et de tenter d'inverser l'âgisme, militent pour avoir un meilleur salaire, plus de personnel etc. C'est une lutte très honorable, travailler dans de meilleures conditions et une lutte syndicale vieille comme les syndicats, mais mon but est ici d'encourager à repenser la question de l'enfance et du système scolaire dans son lien avec le capitalisme-étatisme.

 

Au final, on pourrait presque dire que c'est comme le faux dilemme des flics bien et des flics mauvais·es. Ce qui les caractérise comme "bien" ou mauvais·es" ne devrait pas être leur manière de participer plus doucement aux violences. Dans ce cas, il ne peut y avoir de flic "bien", car le participation à une institution raciste et violente ayant pour rôle de défendre un système pourri, fait déjà d'elleux des mauvais·es personnes. De plus, vue la violence de l'institution policière, rien que le fait d'y participer en tant que flic sois-disant "bien", cautionne la présence des autres, des "mauvais·es" et vous rend donc complice.

 

Vous pourriez chercher à minimiser la violence scolaire mais je dois vous rappeler ce que l'on subit quand on est à l'école, au collège, au lycée et même à la fac :

 

  • Mépris d'âge et de classe, sans compte l'intersection des autre oppressions

  • Évaluation permanente, sous forme ultra-violente de notation, donnant une valeur numérique individuelle à chaque personnelle

  • Aucun mot à dire, lorsqu'un avis est exprimé il est au mieux ridiculisé par les adultes, au pire même pas écouté

  • Les horaires, bordel faire se lever les tous les matins à 7h, dans le meilleur des cas, dès 3-4 ans jusqu'à pire: le travail. Le tout pour rester le cul sur une chaise pendant 8 heure à écouter un vieux con qui vous méprise et veut vous faire ingurgiter de la merde qui ne vous servira JAMAIS à rien, ça vous choque pas ! Le tout en périodes parfois très difficiles physiquement et psychologiquement, je pense à l'adolescence et la puberté entre autres

 

Aussi, les délations d'enfants (vous avez bien lu) de la part de profs (ou non, dans tous les cas, il n'y a pas d'opposition audible, il y a complicité) et odieuse et auraient dû lancer un débat structurel dans les syndicats et dans les salles de profs sur leurs complicité... mais non rien. Le rôle de flic auxiliaire a bien été intégré par le "corps professoral" dans son ensemble.

 

Et je n'ai noté que celles que l'on retrouve à chaque fois, même dans les établissements les plus kiltran. Et imaginez en plus devoir vous coltiner les violences familiales à la maison.

 

Plus de détails dans l'article "10 raisons de détester le lycée" :

Mais cette situation entre en rupture, comme la totalité du capitalisme, au final. Les démissions dans le secteur sont de plus en plus nombreuses, ce qui montre que la prise de conscience augmente.

Bien sûr, ces départs ne sont pas (tous) le fruit de la volonté de lutter aux côtés des EEA pour l'abolition des classes et l'émancipation collective, mais plutôt d'une "perte de sens" du travail due à un nouveau style managérial du ministère : ordre insensés inapplicable, ordre tout court (et oui, c'est nouveau cette conception des profs-soldats), tonne de paperasse à remplir. La thématique de la "perte de sens" du travail, si elle n'est pas une remise en question fondamentale du travail salarié (puisqu'il n'y a de toute façon pas de sens au salariat), s'inscrit dans un contexte mondial de néolibéralisme en rupture. Toutefois, je préfère bien entendu que ces personnes démissionnent plutôt qu'elles continuent de reproduire les violences institutionnelles, quelle que soient leurs raisons de démissionner.

 

Si certaines initiatives personnelles de profs peuvent être intéressantes, il est à remarquer que c'est l'effacement du rôle de prof, de son autorité, au profit de l'autonomisation des EEA, qui donne tout cet intérêt. Un exemple dans cet article :

Il faut aussi garder en tête que ce genre de pédagogies "alternatives" reste compris dans un ensemble, un système, une structure, très solide. Les pédagogies Freinet, anarchistes et autres ont été pensées dans un modèle de société qui voient l'enfance différemment, qui milite contre la domination adulte. Ici et maintenant, sous le capitalisme-étatisme, ces îlots de meilleures conditions ne font qu'atténuer la dureté du système scolaire, pendant une période très brève : le temps d'un "conseil d'élève", d'un cours en autonomie etc. Les notes continueront d'exister, le bac sera toujours à la clé, les profs continueront d'être des agents de l'état et de sa violence institutionnelle.

Toutefois, ces fameux îlots permettent aux élèves d'expérimenter autre chose et de voir, par comparaison, en quoi le système scolaire leur est nocif. Encore faudrait-il qu'elles soient incluses dans un projet émancipateur concret et non qu'il ne s'agisse que de quelques initiatives personnelles.

 

En ce sens, le rôle des profs est plus ambiguë que celui des flics. Il restera toujours une certaine marge de manœuvre, de plus en plus limitée par la bureaucratie capitaliste-étatiste. D'ailleurs, la quantité minuscule de ces initiatives, inscrites dans cette marge de manœuvre, montre la complicité collective immense des profs. Aussi ces initiatives sont vouées à disparaître du fait du jeux de la concurrence entre les "pédagogies". Dans le capitalisme-étatisme, ce n'est pas le bien-être qui est recherché amis le "rendement", ce n'était pas le cas de Freinet, qui aurait sans doute été mis au placard par l'éducation nationale pour "incompétence".

 

Il reste aux profs de se poser la question de leur complicité dans le système capitaliste-étatiste et de leur inévitable domination adulte. Pour ce faire, je propose de conclure vers une émission de Sortir du patriarcapitalisme, une interview d'une philosophe qui rend compte de l'âgisme dans toute sortes de structures : militantes, universitaires, scolaires etc. pour que l'on fasse démissionner lea flic qui est en nous

Vive l'Anarchie ! 🏴

Tag(s) : #anti-école, #police, #âgisme
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